La peinture.
Elle tient une grande place dans mon travail de plasticienne.
Même quand la forme choisie est la performance ou le livre d’artiste, c’est encore souvent de peinture qu’il s’agit.
Broyer des pigments avec un liant, tendre une pièce de coton ou de lin sur un châssis, l’enduire… Des gestes anciens et pourtant…
Quand mon pinceau se pose sur une toile encore blanche, le trac est là.
Je ne veux rien anticiper.
Je me mets à l’écoute des impulsions issues de ma respiration, de mes battements de coeur, des circulations internes… mais aussi de la saison, de la lumière… de l’humeur…
Les pinceaux se mettent en mouvement…
Je tente d’être présente à ce qui émerge progressivement à la surface de la toile, imprégnation, coloration, matières, formes qui se différencient, points de densité…
Un état de présence que je souhaite de plus en plus juste.
C’est le démarrage depuis le début.
Avant d’être peintre j’étais graphiste et ma créativité était au service de travaux de commande. Ça fait vingt ans que j’ai décidé de ne plus être graphiste pour devenir peintre et que le vertige de ces démarrages à l’aveugle est l’ancrage de mon travail de peinture.
Après ce premier temps vient celui où je recule mon point de vue pour adopter un regard plus extérieur.
Re-saisir les éléments, nuancer, accentuer, rehausser, épurer.
Replonger dans le détail de la matière, se laisser ré-absorber.
Reculer à nouveau…
Allers- retours.
Je regarde ma peinture autant qu’elle me regarde.
Dans le travail que je mène actuellement (après la dernière grande série, les Paysages du Corps dont un certain nombre de pièces sont visibles sur ce site), les moyens se réduisent toujours un peu plus. Peu de pigments (terre d’ombre naturelle, bleu outremer, blanc), c’est la texture que je cherche à nuancer. Les figures disparaissent.
Restent des paysages cartographies balayés par les vents, traversés de courants.
Plusieurs temps cohabitent dans un même espace, plusieurs états de séparation entre les terres et les eaux.
Des éléments enfouis apparaitraient au regard alors que des éléments de surface auraient disparu.
Les étapes de travail superposent différents maillages.
Les textes / textures se posent les derniers comme la pensée émerge de l’expérience.